Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/61

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Laure eut envie d’appeler au secours. Ah ! il n’y a jamais que le premier péché qui compte… et elle avait fait son premier péché avec Marcou. Cela pourrait les reprendre, ce mal de se frotter l’un à l’autre… et il était laid, ce paysan, il était homme. Sans lui, elle ignorerait les honteuses démangeaisons de sa chair, et les cris des accouchées la laisseraient froide.

— Non, Marcou, ce n’est pas possible, je ne veux plus, déclara-t-elle fiévreusement.

Le garçon n’avait rien sollicité, mais il tressaillit. Dans les obscurités de son âme, il comprit qu’elle y pensait pourtant au petit jeu des angéliques. Il ricana d’un rire niais :

— Quoi que vous ne voulez pas, mademoiselle Laure ?

Ce n’était plus le petit goret rose apportant des œufs de pie à Estérac. Marcou avait des hanches pointant sous ses hardes comme deux échalas. Ses cheveux roux tombaient sur ses yeux verdâtres comme un roncier sur un précipice, et il tendait des pattes osseuses, terreuses, qui pouvaient vous bousculer d’importance, mais quand il relevait le front ses yeux s’éclairaient de convoitises, ses cils blonds étaient blancs comme une frange d’argent au soleil.

Flattée de ce titre : Mademoiselle, un rire aussi vint à Laure.

— Ce n’est pas la peine de s’expliquer, Marcou, tais-toi !