Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/148

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teste les aventures, au moins pour elle-même. Elle doit être allée au barrage chercher le Petit Journal, dont elle suit le feuilleton.

— Au moment de servir le déjeuner !

On entendit le bruit de la grille se refermant. Le fox-terrier aboya férocement et une ombre plana sur le perron tout enguirlandé de clématites. Charlotte revenait en courant, décoiffée au point de perdre ses peignes de simili. Elle était rouge, perdait la face autant que son chignon.

— Messieurs, dit-elle, j’étais allée au four (on appelait ainsi la maison de la mère Fonteau) pour prendre les œufs à la coque qui n’étaient pas encore pondus ce matin, et j’ai rencontré des braconniers, là-dedans. Un vieux qui aime à rire et un jeune qui aime à se fâcher. C’était un boucan à ne pas s’entendre. On y parlait de Madame. Naturellement, j’ai pas pu tenir ma langue et j’ai dit un mot de trop. Le vieux et le jeune ont failli se dévorer. C’est fini. Je n’y retourne plus. Trouvera des œufs frais qui voudra. Non, ce n’est pas une vie !… Tenez, le grand diable noir m’a suivi, malgré la vieille sorcière. Il apporte ses cailles. Débrouillez-vous avec lui, moi, je vais prévenir