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Page:Rachilde - L’Homme roux, suivi de La Fille de neige, 1888.djvu/105

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son peu d’empressement. Involontairement, je ralentissais ma marche ; j’aurais voulu encore rester dans ce bois, seule avec mes pensées sombres comme ma robe de deuil, mais auxquelles, ici, personne n’avait le droit de m’arracher.

Je me trouvais dans une large allée plantée de chaque côté d’énormes hêtres, j’avais toujours devant moi l’indécise perspective du brouillard. Je me souvenais que dans ce parc Madge avait erré avec le contre-maître, oui, c’était dans ce lieu maudit qu’elle avait eu ses premiers rendez-vous avec l’homme qui l’avait perdue ! Ce souvenir me serra le cœur et me fit presser le pas. Je songeais à James, je le voyais, méchant, ironique, torturant et entraînant ma sœur chérie… Je le voyais si bien que, sous le voile gris de la brume, il me semblait reconnaître une forme humaine… cette forme se mouvait… se rapprochait ! J’avais beau passer ma main sur mon front pour en écarter cette vision, j’étais presque certaine de voir un homme, un homme en chair et en os devant moi. Je marchai plus vite, mais l’illusion ne fut plus possible : James était au