Page:Rachilde - L’Homme roux, suivi de La Fille de neige, 1888.djvu/223

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Ma volonté domina mes douleurs. J’avais une dernière lutte à supporter ; un dernier combat à subir ; James savait que j’allais me remarier.

On descendit, pour moi, une chaise longue au salon ; je priai qu’on ne m’apportât point le baby, sa vue m’eut été trop pénible. Il allait mieux, le cher enfant ! Sa mère me l’assura. Elle ajouta très naïvement :

— Qui l’aimera ainsi quand tu seras loin ?

Pauvre Madge ! On me laissa seule : mon repos ne fut pas long ; James entra ; il referma la porte sans s’inquiéter de rien. Il vint à moi, se croisa les bras et me contempla avec ce regard profond et dur qui m’épouvantait.

— Ainsi, dit-il, ce n’était pas un moment de faiblesse que vous avez eu, l’autre jour ? Vous êtes toujours la même, toujours aussi puissante, aussi froide !… Cette femme que je vois devant moi, qui est jeune, qui a un cœur, est incapable de ressentir un seul mouvement de passion ! On la tuera lentement, sans obtenir un mot de pitié !… Je la verrai mourir, ou je mourrai moi-même, sans que sa haine s’apaise une seule seconde !