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Page:Rachilde - La Découverte de l’Amérique, 1919.djvu/191

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seize ans bientôt. Alors on verra ce qu’il peut faire d’une de ces armes, puisqu’il aime le sang. Rohild et lui n’échangent pas un mot, se comprennent par gestes. Quand le mauvais temps secoue leur misérable embarcation, ils ne sont plus qu’un même homme pour lutter contre les perfidies de l’eau et c’est souvent Hereld le plus perfide.

La barque va, lente, le long de la côte ; louvoyant en vue de la grève grise, elle brise la force des ondes troubles mêlées de neiges fondues, clapote comme une vieille bavarde. L’air vif lèche la figuré, devient acide à la bouche, et en le respirant on croirait mordre dans un fruit vert. L’aurore infuse aux veines bleuâtres des banquises, le vin rouge du soleil qui bout et s’extravase dans les sommets lointains avec des tons de flammes. Pour les deux courageux garçons, il ne fait plus froid, c’est fini de la nuit d’hiver. Les vapeurs ardoisées se diluent peu à peu en flocons roses, d’un rose