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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/102

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vous êtes trop orgueilleux ? Mon ambition serait de vous voir pleurer d’amour…

Elle soutenait le heurt de ses prunelles fixes sans aucune gêne apparente et semblait dévisager en lui autre chose que lui.

— Je suis fatigué, fit-il très bas, ses paupières subitement closes, je n’ai pas envie de mourir de chagrin, mais j’ai sommeil, vous ne me faites pas peur, puisque vous m’attirez toujours, vous m’humiliez, seulement, Éliante, je n’ai rien à vous donner que moi-même, prenez-moi et ne continuez pas à me faire l’aumône. Je souffre à la fin, c’est beaucoup trop long, ces préambules, je ne pleure jamais, en effet… vous n’aurez pas ce plaisir. Je ne comprends pas qu’une femme puisse demeurer ainsi sans émotion physique sous le regard d’un homme qui la veut… Vous êtes odieuse, sinon ridicule.

Quand il ouvrit les yeux, Éliante était à genoux devant lui et la traîne de sa jupe blanche s’incendiait de tous les reflets du feu comme une grande opâle. Elle était bien sur les deux genoux, ses deux petites mains jointes.

— Je veux, dit-elle, d’une voix très douce dont la douceur contrastait avec la violence de ses paroles, je veux que vous sachiez ce que je sais, que vous alliez aussi loin que moi, j’exige et j’ai le droit d’exiger que vous me choisissiez