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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/116

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Monsieur Donalger vous aimait passionnément, je m’en doute. Vous ne lui rendiez guère son amour, ce n’était pas un crime parce que vous étiez trop… jeune pour lui. À présent, la coupe déborde… cela vous lasse d’être veuve… tendez-la-moi, cette coupe, soyez tranquille, je me charge de l’épuiser ! J’ai une soif capable de mettre un océan d’amour à sec. Alors l’histoire de la potiche n’était donc pas une comédie ? Vous auriez voulu réaliser ce joli rêve de demeurer chaste… en demeurant amoureuse ? Cela donne des attaques de nerfs, madame ? Il était très bon, très généreux, ce mari, vous comblant de cadeaux, satisfaisait tous vos caprices, et, vous, fillette pauvre, sortie d’un couvent triste, vous aviez le remords de ne pas satisfaire entièrement cet homme-là ? Est-ce que je devine ? Vous lui devez tout, et vous pensez lui devoir aussi l’éternelle fidélité. Je crois, ma belle Éliante, que vous exagérez. On n’aime pas sur mesure, la vraie passion ne s’endosse pas comme une de vos robes orientales. Cet homme pourrait être le meilleur des mortels, vous n’étiez pas forcée de l’adorer pour sa seule générosité. Montrez-moi donc son portrait avant les autres choses, voulez-vous, mon… amie ?

Éliante se leva. Il s’aperçut qu’elle souriait, maintenant, d’un sourire étrange, et les petites