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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/117

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rides qui mettaient sa bouche fine entre deux parenthèses se creusaient singulièrement.

— Oui, dit-elle d’un ton sourd, je vais vous le montrer. J’aurais dû commencer par là.

Elle se dirigea vers un grand cabinet incrusté de nacre et d’or, un meuble de laque sombre aux reflets d’étoiles, séparé en deux corps par une étagère bistournée imitant un escalier de pagode tout encombré de bibelots. Le vantail gauche représentait des monts de glace illuminés par une aurore boréale. Éliante fit grincer une clé, les monts de glace disparurent, s’abîmèrent, et du feu sembla jaillir de l’intérieur du meuble, qui était doublé de cuivre rouge. De ce sanctuaire fulgurant, elle relira un porte-feuille de maroquin mauve, l’ouvrit, et l’étudiant en médecine ne put s’empêcher de remarquer que le portrait du défunt se trouvait à l’abri des indiscrétions comme une pièce anatomique.

Léon se dressa sur les genoux, s’accoudant aux genoux d’Éliante. On allait enfin lui présenter ce mari dont le souvenir enchantait toujours sa veuve ; l’autre homme, l’ennemi mort de l’amour naissant.

Mme Donalger posa devant lui une grande photographie, une tête d’officier, coiffée du képi bas et galonné des marins, les joues ornées