Aller au contenu

Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/132

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

voyez ! Ce sont des hommes et des femmes tordus ensemble avec le dragon, l’éternel dragon qui représente tout, dans ce pays si vieux et si spirituel. C’est à la fois la chimère, ce dieu, le démon, le soleil et la lune, c’est surtout la passion ! Il a une gueule de flammes, des yeux sanglants, des griffes d’or et des ailes d’escarboucles. Quant à sa queue immense, préhensile et s’annelant, elle accomplit toutes les fonctions naturelles, surnaturelles ou sociales. L’homme et la femme sont constellés de ses gemmes précieuses. Les temples sont éclairés par sa transparence, et, devant les magasins, on y accroche modestement des lanternes !… On ne trouve pas facilement ce travail d’ivoire et de jade sur les marchés ouverts aux européens. Il a fallu voler celui-là dans une pagode, si on peut appeler voler offrir une somme énorme à un prêtre pour le corrompre ? Mais, mon mari tenait à sa couronne de plaisir !

Léon Reille examinait, horrifié. Les petits hommes et les petites femmes tordus ensemble ne pouvant plus s’échapper et reliés entre eux, tantôt par la gueule du dragon, une gueule rouge, tantôt par les extrémités crochues de ses ailes, des griffes vertes, tantôt par sa longue queue violette ou rose, conservaient d’intra-