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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/14

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poupée peinte, ornée d’un bonnet de cheveux lisses, brillants, à reflets d’acier, des cheveux se collant aux tempes, trop tordus, trop fins, si fins qu’ils imitaient la soierie, un lambeau de sa robe noire, cette gaine satinée presque métallique. Ainsi coiffée d’une coiffure étroite posée sur de minces oreilles rouges qui paraissaient vraiment saigner sous le poids d’un casque coupant, elle était plus blanche de son fard qu’aucune autre femme fardée.

Elle avait de chaque côté de sa bouche, d’un rose de cuivre, des petites rides fines, parenthèses plaçant ses lèvres en dehors de toutes les lèvres et indiquant qu’on pouvait lire des choses irrégulières entre les lignes de ses traits réguliers.

Elle vivait cependant, puisqu’elle s’arrêta devant une glace. Elle eut un regard curieux, ne se regardant pas, mais guettant quelqu’un par-dessus son épaule gauche.

L’antichambre était déserte. La glace ne reflétait que la statue de marbre, là-bas, une nymphe tenant une torchère, et, ici, la silhouette obscure de la femme immobile, également statue, deux jumelles se tournant le dos, celle-là très nue, répandant du froid dans les transparences électriques, celle-ci merveilleusement habillée, moins réelle encore, et ces muets fantômes