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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/171

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Les yeux dans ses yeux, elle lui posa ses mains sur ses flancs. Ils brûlaient, et il fut si étonné qu’il ne songea même pas à en sourire.

— Mais, chérie, ce n’est pas raisonnable. On n’a pas chaud comme ça quand on veut vivre seule !

— On a chaud comme cela quand on est l’Amour… et quand on est l’amour on peut vivre seule. Va-t’en, dis…

Il ne s’en allait pas, les bras tombés.

Elle s’habilla, résignée à ne pas ôter son maillot. Elle mit un bizarre costume, une espèce de redingote en velours noir, très cintrée à la taille par derrière, s’ouvrant, par devant, sur une longue cascade en gaze de soie jaune soufre. Des broches de rubis et d’améthystes mêlées attachaient la redingote sur les dessous mousseux. Comme une bonne actrice qui doit rentrer en scène, elle refit son visage, et, le dernier coup de houppe donné, elle se tourna :

— Regarde-moi ! je suis vieille… aussi vieille que l’amour, et je me sens aussi jeune que lorsque je sortais de mon couvent. Tu veux m’épouser ? Tu es mon fiancé ? Je te promets de te donner une vierge en récompense ! Ce sera la monnaie de la médaille… Allons, ton bras… et sauvons-nous vite.

Dans le bal, Missie criait :