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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/211

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passer un affreux bout de chair exsangue. Il couvrit le tout, oreille et plâtre, d’un linge, s’essuya les mains et brossa sa veste d’un geste furieux.

Ah ! Il était gentil, lui, pour un rendez-vous d’amour !

Et elle donc ?

Mme Donalger, toujours assise en face de la croisée, regardait maintenant le large cadre de bois gris qui encadrait dans cette chambre un superbe tableau de maître paysagiste, des cimes d’arbres immobiles en ce moment sous le soleil comme une peinture sous le vernis.

Elle était vêtue d’un costume de laine noire, très sobre, une veste d’astrakan lui épaississait la taille, et coiffée en petits bandeaux plats, elle portait une capote de tulle noir, ornée d’une aigrette de jais. Elle avait le teint ivoirin, plus jaune à cause d’une voilette de tulle noir, toute unie, qui lui barrait le visage de plis durs comme des rides.

Et ne souriant pas, elle effrayait.

— Je vous dérange, cher Monsieur, car en effet vous ne m’attendiez pas, dit-elle, d’un ton affectueux, sans équivoque plaisante, un ton très résigné, mais je me suis décidée aujourd’hui, par le beau temps. Si vous saviez comme on respire dehors ? Cela sent presque le lilas, bien que