Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/288

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frotter sa tête au corsage d’Éliante. Celle-ci se recula, un éclair dans les prunelles.

Il y avait pourtant un orage qui couvait dans cette atmosphère d’amour, des jalousies féroces qui dormaient comme les grands fauves pendus et crucifiés aux murailles, et, quelquefois, dans un coup d’éventail éparpillant l’odeur des fleurs et la saveur des fruits des îles, on sentait monter plus haut le parfum des races nègres, des anthropophages !

Après la pavane, Missie et Léon dansèrent, se disputèrent, s’égosillèrent et finirent par se prendre à bras le corps. Il s’agissait de la valse.

Mlle Fréhel frappait de désespérés accords, s’efforçant d’inculquer la science du rythme au jeune homme qui s’irritait peu à peu.

Un moment, Missie le menaça de le pincer.

Alors, il vint, tout piteux, vers Éliante.

— Vous ne voudriez pas vous charger de moi ?

— Non, dit-elle d’une voix dure. Je ne peux danser qu’avec ceux qui savent. Je suis trop vieille pour apprendre… à ne plus savoir.

— Cruelle ! Vous êtes odieusement cruelle ! Essayons…

— À table d’abord, nous danserons plus tard, fit Éliante s’échappant de ses bras.

Elle poussa la table au milieu de sa chambre.

— Allons… songea Léon, elle a quelque