Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/289

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chose… mais quoi ? La pudeur ? Un remords ? L’idée de se venger de sa défaite par une recrudescence de coquetterie ? Je la tiens et je l’aurai… cette belle nerveuse… ou c’est cette nuit que je la bats !

Le chat sauvage commençait à se faire les griffes sur les fourrures blanches.

Il vint s’asseoir à la droite d’Éliante, et Mlle Fréhel se mit à gauche, Missie en face.

Ce fut un joli tintement de petites cuillères sur les porcelaines et les cristaux, des mots vifs tombant en coups de pattes sur les fruits et des morsures gourmandes dans les pulpes savoureuses. Les pommes d’Anam eurent un grand succès. Missie et Léon changèrent de paille sans y faire attention. Léon se grisait doucement, car il sentait le genou d’Éliante près du sien. Effleurer son genou ? Ce soir il l’aurait toute ! Peu lui coûtait d’être respectueux. Missie, en lui passant une coupe de champagne, en répandit sur la nappe, et Mlle Fréhel dit gaîment :

— Signe de mariage !

— Promesse d’amour, Mademoiselle ! répondit Léon vivement.

— C’est plus modeste, risqua Missie, et les deux jeunes filles éclatèrent de rire en buvant à sa santé.