Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/292

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la forte odeur de poivre s’exhalant des caisses ouvertes, une odeur de piraterie.

Bientôt Léon eut autour de lui, papillonnant, tournoyant, s’arrêtant aux miroirs ou consultant son goût toutes les beautés d’un harem ; les deux jeunes filles changèrent quatre fois de costumes, puis revinrent à la dame turque et à la dame japonaise qui leur seyaient mieux. Toute pâle, toute blanche, agenouillée devant les caisses, plongeant sans cesse les bras et en retirant ses belles mains chargées, Mme Donalger puisait toujours de nouvelles richesses. Elle retira un costume de Malaise, un sarrong de laine verte et bourrue, ornée de perles noires, une écharpe d’un tissu noir et jaune, sonnant sous l’ongle comme un feuillage sec, et un chapeau de vieille paille tout plein de poudre de safran. Au chapeau pendait un affreux madras, et à l’écharpe s’attachait, dans une gaine de cuir, un kriss à lame tortillée comme un sinistre dard de reptile, puis un costume océanien, très sommaire, un pagne étroit à raies bleues, en coton blanc, un petit étui d’os travaillé contenant un jeu d’épingles en arêtes de poissons. Ceux-là… on ne pouvait guère les essayer.

— Voilà, c’est tout ! Mes petites amies, je vous les donne, déclara Éliante d’une voix lente. Partagez-les en sœurs. Prenez chacune