Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/36

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demandez-vous, en échange de ce que je vous demande ? Le soir où j’ai volé une de vos cartes devant vous, pour connaître enfin votre nom, il fallait me défendre de vous suivre… Éliante ! Quel nom bizarre ! Cela est fou de s’appeler ainsi ! J’ai rêvé une nuit que ma pendule sonnait votre nom : Éliante ! Regardez-moi donc un peu, voulez-vous… en face… en face…

Il lui tenait maintenant les poignets, ses poignets minces où on voyait se tordre de fines petites vipères bleues, presque violettes, sous la chair tendre et blanche.

— Éliante ?

Elle se leva, laissa glisser le châle multicolore, son étendard d’aventurière, parut plus noire, plus grande :

— À mon tour, écoutez-moi, mon… cher enfant… et ne me faites pas de mal inutilement. Je suis libre de choisir mon heure et même de ne pas vouloir du tout. Je suis capricieuse, ennuyée, assez souffrante pour craindre un surcroît de souffrances physiques ou morales. Je ne cherche que la paix et l’oubli. Vous êtes venu jusqu’ici m’accompagner… honnêtement. Vous vous en retournerez… sans moi. Ces choses arrivent dans le meilleur monde. On soupe et on se relire. Je trouve absurde qu’un homme ne puisse pas causer en tête à tête avec une