Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/40

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ses flancs de vierge.) Sentez-vous, dites, cette douceur si désespérante du contour enfin délimité ? Il n’ira pas plus loin, car il a atteint la perfection. Il n’augmentera ni ne diminuera, il est immuablement de la beauté. Ah ! vraiment je veux que vous sachiez, au moins cinq minutes, vous extasier, de la bonne façon et sur quelque chose d’immortel. Vous ne riez plus ? Il vous fait peur, il vous fait honte ! Oh ! Je savais bien, moi, que vous étiez très intelligent… parce que la volupté vous fait pâlir. Ce vase miraculeux est pâle de la volupté d’être lui-même ! (Elle eut un petit battement de paupières, et Léon Reille reçut l’impression d’un battement d’ailes.) Il n’a pas d’histoire. Je l’ai obtenu par les intermédiaires habituel, j’allais dire : les entremetteurs ! On me l’a vendu à Tunis comme on m’aurait vendu un esclave. Il avait été découvert dans les fouilles… Quelles fouilles ? Je l’ignore… et il était abîmé, mais je l’ai fait… soigner, son ancienne blessure est invisible. Il n’a pas d’anse. Ce serait horrible de lui savoir des bras immobilisés pour toujours. Et il n’a aucun bijou sur lui, ni inscription, ni petit collier de chien, grains de corail ou grecque d’or. Je l’aime pour son entière innocence… Et qu’a-t-il vu, mon Dieu ? Des choses effrayantes, sans doute, sous la terre, plongé dans l’obs-