Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/44

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plus… si vous m’aimez si peu que cela. En effet, vous ne m’aimez pas, Monsieur. Alors que prétendez-vous m’offrir ? Quelle confiance peuton avoir dans cet homme qui passe ? Vous ne passerez pas chez moi… ou vous resterez. Un frisson ? Ce n’est pas beaucoup pour celle qui est le frisson incarné ! Une flamme ? C’est trop peu pour une qui est toute la fournaise ! Mon mal ? Je l’avoue : je me meurs d’amour, et, comme le phénix, je renais, après avoir brûlé, de l’amour ! Simplement. Ce n’est pas plus étonnant que cela, bien que cela surprenne tous les médecins. Non, je n’ôte jamais ma robe… seulement, regardez-moi… je me meurs !

Éliante, à présent dressée au-dessus du col de l’amphore blanche, se tendit comme un arc de la nuque aux talons. Elle ne s’offrait point à l’homme ; elle se donnait au vase d’albâtre, le personnage insensible de la pièce. Sans un geste indécent, les bras chastement croisés sur cette forme svelte, ni fille ni garçon, elle crispa un peu ses doigts, demeurant silencieuse, puis, l’homme vit ses paupières closes se disjoindre, ses lèvres s’entr’ouvrirent, et il lui sembla que des clartés d’étoiles tombaient du blanc de ses yeux, de l’émail de ses dents ; un léger frisson courut le long de son corps, — ce fut plutôt une risée plissant l’onde mystérieuse de