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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/89

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alterné de ses consciences inconscientes. De plus, elle parle deux langues très correctement : l’anglais, l’italien, et elle sait mieux encore ce qu’il faut d’argot parisien pour distraire la rêverie d’un homme. Ses cheveux sont lourds. Son cerveau est lourd, mais il faut lui apprendre à coiffer son esprit. Elle attend tout d’un mari et ne lui a rien préparé. Je crois qu’elle vaut qu’on s’en occupe. Je vais m’expliquer sur ma phrase : « J’ai essayé d’en faire une belle et spirituelle courtisane. » J’ai dû vous scandaliser en vous racontant cela. Je ne crois qu’à l’amour, et j’essaie de lui rapporter tous mes actes et toutes mes paroles. Voilà pourquoi j’ai voulu causer d’amour avec Missie. Elle n’a rien compris, sinon que sa très réelle honnêteté s’est émue au point de dévier un moment vers des manifestations ridicules. Elle a failli m’aimer parce que… m’aimeront toujours ceux qui me verront prêcher dans le temple. J’ai fermé le sanctuaire avant l’irréparable ; si elle n’était pas demeurée une vierge ignorante, elle serait tombée dans une bestialité affreuse, et jamais aucun homme n’aurait pu la sortir de son marécage. Je lui parlais d’une religion en mystique, elle me répondait en… étudiant en médecine, et cela ne convenait point à mon tempérament réellement amoureux. Elle aurait désiré m’aider, inconsciem-