Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/198

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— Fulbert ?

Elle tourmentait le manche de son ombrelle, la lèvre nerveuse, les sourcils froncés.

— Enfin, je sais que le sujet t’irrite, cependant ce n’est pas possible de venir ici pour la première fois sans être suffoqué, ma chère.

— Taisez-vous donc… il ne faut jamais me tutoyer dehors !

— Même quand on se trouve au milieu d’un désert ? Même en baissant la voix… À ce propos, Marguerite, avez-vous remarqué que lorsqu’on vous dit chut ! on est porté à répéter tout bas ce que l’on vient de crier ?… Ce qui est stupide puisqu’on vous a déjà trop entendu. (Il fit une pause.) Marguerite… je t’aime, ajouta-t-il plus bas.

— Non… vous ne m’aimez pas, ça vous amuse de me le dire pour me le faire croire.

— Peut-être… et vous ? Cela vous amuse-t-il de me mentir aussi bien ?

— Vous êtes quelqu’un que je ne connais pas.

— Tant mieux. Dès que deux amants se connaissent des pieds à la tête et du cœur au cerveau, ils n’ont plus qu’à se séparer. Il faut qu’ils aient toujours la surprise de se découvrir, sous peine de ne plus pouvoir se souffrir mutuelle-