Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/65

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

courant jaunâtre là-haut sur les collines — ne disaient rien, les femmes ne se disputaient pas, ne chantaient pas ; elles manœuvraient avec une indolence flagrante. On s’imaginait aisément l’état d’âme de ces gens à voir leurs mouvements ni fatigués ni actifs : cela pousserait bien tout seul. Et on triturait cela d’un bec solide et sûr imitant les corbeaux. La terre, pressée comme une éponge, rendait l’eau, gardait la fange, une haleine tiède soufflait, en dessous, pour gonfler les grains et on devait récolter le lendemain, du train où l’on entendait ronfler les machines.

— M’ont-ils vu ? se demandait l’homme un peu inquiet.

Personne, du reste, ne s’occupait de lui. Ces gens sérieux, tout à leur affaire, n’avaient pas l’idée de lui disputer la possession de sa cabane. Il se trouvait entre les deux limites : l’une, la muraille gouvernementale séparant le champ de la forêt, l’autre, un imperceptible renflement du sol qui se prolongeait à l’infini, sorte d’immense serpent qu’on aurait enterré le long de la plaine. Il faisait partie du déchet, un coin de broussaille et de bruyères qu’on défricherait plus tard, si le gouvernement reculait sa borne ! Pour le moment, on avait assez de travail ailleurs, le vagabond