Aller au contenu

Page:Rachilde - Le Grand saigneur, 1922.djvu/109

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Vous n’avez pas le droit d’être jaloux, puisque vous ne pouvez pas m’aimer. Cet amant, que je n’ai pas choisi, n’est plus. Personne, pas plus mon frère que d’autres, n’a jamais rien su de lui. Il est inutile que vous appreniez son nom. Ça n’ajouterait rien à ma faute, ni à la sienne, hélas ! J’ai parlé… simplement parce que je vous aime, que vous ne m’y forciez pas et que j’ignore l’art du mensonge où vous excellez, vous, monsieur. Lâchez-moi, dites ? C’est l’heure à laquelle mon frère revient de son atelier.

— Marie, vous serez ma femme légitime. Je le veux.

— Je suis trop pauvre et vous êtes riche, très riche, paraît-il ?

— On ne l’est jamais assez, puisqu’on ne peut jamais acheter tout ce que l’on désire. Marie, je désire votre vie, votre sang, votre admirable santé, votre adorable beauté. Il faut consentir… parce que vous m’aimez. Je suis le plus fort, en effet, car je possède votre amour !… En me le donnant, vous me donnez tout… moi je n’ai rien, qu’un nom et une fortune — je suis le plus pauvre des deux. Voulez-vous ?

Elle inclina la tête, fermant les yeux, car elle allait se trouver mal.