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Page:Rachilde - Le Grand saigneur, 1922.djvu/218

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tait de là des vapeurs bridantes qu’il recevait en plein visage sans s’en émouvoir autrement. Cet énorme monstre mécanique, en face de cet autre monstre humain, couvert d’une sombre peau d’ours comme un habitant des cavernes de la préhistoire, faisait de plus en plus l’effet d’un cauchemar à Michel, qui se mit à claquer des dents.

Très petit garçon devant l’austérité nocturne de la nature qu’il ne connaissait pas et intimidé par cette espèce de haut fantôme aux yeux luisants, dont il ne voyait guère que la main gantée de clair qui plongeait dans les flancs de la bête, il eut une impression d’horreur irraisonnée.

Où était-on ?

Pourquoi ce presque soudain silence et cette effarante obscurité ?

— Pourquoi ne rallumez-vous pas le phare ? cria-t-il involontairement. Cette nuit sans lune et cette voix mystérieuse de l’eau qui pleure, c’est à vous donner des nerfs.

— Vous êtes décidément très femme ! fit le marquis en refermant son capot d’un geste brutal. Remontez donc dans la voiture, hein, et tachez de vous y rendormir tout à fait. Moi, j’y