Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/168

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vision, l’histoire de son crime. À moi, redoutant un nouveau refus, il ne s’était point confessé. Il avait vomi, en état de fièvre ardente, toutes ses souffrances et toutes ses hontes. Il ne demandait plus l’absolution, mais la mort ! Je le fis coucher dans la chambre la moins visitée de ma maison, me réservant de le confesser quand il serait revenu de ses émotions, sinon à la santé. Seulement, lorsque les reliques furent arrivées à Poitiers, la reine Radegunde me priant de les faire placer au monastère avec l’honneur qui leur était dû et des chants solennels, sans avoir égard à sa demande je monte à cheval pour m’éloigner au galop. Dans le doute je m’abstenais… Voilà pourquoi, ma sœur, je n’ai jamais pu me rendre à votre église abbatiale d’un cœur libre et l’esprit dispos. J’ai eu souvent l’occasion de voir la mystérieuse relique. Elle m’est apparue absolument fausse, d’un bois ordinaire qui n’avait point l’âge requis pour nous représenter celui qu’on attendait d’Orient. Je n’ai rien dit parce que j’aurais hâté la fin de la bienheureuse Radegunde. Aujourd’hui, je parle parce que vous, ma sœur, vous confiez votre existence aux artifices de Satan. Votre monastère est maudit depuis de longues années et, à cette heure, nous parlerions tous les deux qu’on ne nous croirait pas.