Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/17

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l’aspect d’une tente toujours prête à se lever pour partir en guerre. Sous les piliers, des troncs de chêne mal équarris que les pluies avaient rendus noirs, s’amassaient des armes de toutes les espèces et des chariots dételés, dont les roues se dentaient de fer de faulx. Séparées par un large sillon rempli de branchages verts et de fagots secs, une ligne de démarcation, qui était aussi une ligne de défense en cas d’attaque, les huttes des esclaves et les tentes des soldats s’encombraient d’animaux de toutes sortes : porcs vautrés dans la boue, chèvres et vaches mises au pieu, moutons pressés les uns contre les autres conservant sur leur dos la bottelée de foin ou d’herbage frais qu’ils devaient emporter eux-mêmes à la première alerte. Cela formait, dans l’ombre, tout un monde grouillant d’une redoutable apparence. Les vaches, de loin, agitaient des têtes de monstres, démesurées, haussées par les amas d’herbage qui les auréolaient de chevelures effroyables.

L’arrivée des deux compagnons et de leurs chiens mit tout le camp en rumeur. Quelques torches s’allumèrent, tachant de sang les figures cruelles. Des chevaux hennirent.

Ragnacaire, le plus grand et le moins éloquent, poussa, du coude, Harog, le plus petit, celui qui