Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/206

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nuit impure ! murmura l’Aveugle-né en levant son grand bras décharné dans un essai de malédiction. Tous les mendiants grondèrent.

— Il est le fils de la nuit impure !

— Je suis Harog, le tueur de loups ! Et les louves de la forêt m’obéissent, m’apportent leurs louveteaux que je change en chiens pour me garder ! ricana le terrible garçon.

Ragnacaire, anxieux, siffla et l’on vit brusquement jaillir des gueules ouvertes de tous les fourrés voisins. Les sept chiens d’enfer veillaient…

— C’est lui qui a délivré Poitiers de la bête dévorante, avoua l’un des mendiants. J’y étais, je l’ai vu brandissant son couteau et notre évêque l’a béni !

— Il est connu des dieux de la Pierre, dit Brodulphe le bel esclave. J’ai confiance en la dureté de son cœur. Je jurerai.

Il y eut un nouveau silence plein de frissons.

Le mystère se levait autour d’eux, surgissait lentement avec les ombres de la nuit développées par les arbres géants. On était bien loin des villes, des basiliques et des palais. À quoi pouvait donc leur être utile leur foi déjà presque morte, étouffée par la superstition, toutes les anciennes croyances aux dieux de la Gaule ? Les eulogies, la charité chré-