Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/273

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sants, frémissant d’une rage soudaine. Brodulphe-l’Adultère reçut le tranchant d’une hache sur la cuisse ; la femme qu’il portait poussant des cris aigus il crut que c’était elle qu’on blessait et assomma son adversaire d’un coup de framée. L’Aveugle-né, vociférant tous les noms de saints qu’il savait, faisait de terrible besogne malgré Visigarde évanouie, et Boson-le-Boucher, le couteau dans les dents, tapait sur les crânes avec une massue de chêne.

La ville se réveillait, les rues s’emplissaient de gens, les yeux gros de sommeil, demandant des explications ; les seuils vomissaient des femmes révolutionnées criant aux armes et des hommes brandissant des fourches. Quel était donc ce pèlerinage en attirail de guerre ? Vient-on prier les saints avec des lances et des massues ?

Basine, le visage transfiguré, rose comme un jeune garçon ivre de son premier vin, poussait son cheval sur des faces paisibles, piquait dans le dos des bons marchands gras qui roulaient, pareils à des outres crevées, ruisselantes de leur liqueur. La foule s’ameutait, puis se dispersait, piétinée douloureusement par les chevaux qui se cabraient, semblaient éperdument joyeux de retrouver la liberté de la tuerie. Bientôt, il n’y eut plus de poitrines à défoncer ni de dos à fendre. Les habitants