Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/289

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qu’ils avaient prostituées à leur bon plaisir, séduisant celle-ci, violant celle-là, se les repassant parce qu’elles oubliaient le nom de leurs amants en s’enivrant presque autant qu’eux et tombant dans tous les coins à leur merci. Seul un couple d’êtres privilégiés, un couple d’oiseaux de proie, planait sans se salir les ailes, leurs vrais maîtres à tous par leur âpre volonté de demeurer chastes, et ces brutes les respectaient, ayant une peur superstitieuse de leur sagesse confinant au sortilège.

Comme Childéric-le-Saxon, ayant bien bu, hoquetait, se tenant les côtes, l’un des vantaux barricadés retentit d’un coup sourd.

C’était le poing vigoureux de l’évêque Saffarius.

Il y eut un silence de mort, car jamais personne, jusqu’ici, n’avait osé leur demander ni l’aumône ni les sacrements.

— Voilà qu’on nous apporte le viatique ! fit joyeusement Childéric, très peu soucieux de conserver une dignité quelconque à la révolte de ces gens qu’il ne connaissait que pour l’avoir toléré en lui versant généreusement les produits de leur vol.

Ragnacaire, présent, bondit sur sa hache et Harog, qui arrivait, très inquiet, s’avança vers l’ivrogne.

— Childéric, dit-il l’œil plein d’éclairs, il faut