Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/319

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Il restait debout devant elle, très grave, son visage pâle illuminé de ses yeux fulgurants, sous l’empire d’une colère à peine contenue qui lui crispait la main autour du manche de son couteau.

— Est-ce Basine qui t’envoie ? interrogea Chrodielde très étonnée de l’ouïr lui demander une espèce de grâce, lui qui affectait de ne plus croiser sa route.

— Je viens pour mon compte. J’aurais pu ordonner de libérer cette esclave parce que, jusqu’ici, j’ai conduit notre entreprise, mais je suis las de voir sur nos têtes s’amonceler tant d’orages que je ne peux conjurer. Le métier de chef me pèse… je te cède volontiers ma place. Tu t’entends mieux que moi à museler les loups…

— Moi aussi, je suis lasse, murmura Chrodielde, bâillante !

Elle le regardait curieusement à la lueur de la lune échancrant le fronton de la basilique et il n’eut pas l’idée de fuir un orage plus près de sa tête qu’aucun autre malgré la sérénité du ciel.

— Je suis lasse, parce qu’on ne me respecte pas, soupira Chrodielde. Toi-même éprouves à mon égard une répulsion trop visible. Comment pourrons-nous réaliser ce que nous rêvons tous si nous