Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/343

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— As-tu la crainte de me trouver un visage nouveau ?… La crainte ou le désir, Chrodielde ? Ta fidélité ne te pèse-t-elle point depuis que tu m’aimes.

Elle se mit à rire amèrement.

— Et toi, ne voudrais-tu pas changer mon corps pour celui de Basine ? Mettre le soleil à la place de la nuit ? Lâche berger qui n’oses pas prendre de force qui lui résiste.

— Tu me le pardonnerais ?

— Si tu n’étais mon maître-sorcier, je te l’ordonnerais plutôt.

— Quand on a été le témoin de ce que j’ai vu chez un roi parricide, on est incapable du crime de viol. Par la Pierre et l’Herbe des douleurs, tous les crimes… pas celui-là !

— Elle t’aimerait ensuite, j’en suis sûre.

— Et n’aurait plus l’occasion d’être abbesse, Chrodielde !

Elle n’aperçut point son sourire de raillerie, mais, inquiète, frotta son front contre la poitrine d’Harog. On eût dit la chevrette dans le temps que les cornes lui font mal et ses nattes coulèrent le long de ses épaules tordant leurs caresses perfides autour du jeune homme.

— Tu ne m’appartiens pas, gémit-elle ; ton cœur