Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/363

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Tremblante, elle le bénit de ses mains d’où coulait la vase fluente et verte, d’un vert de poison.

— Je te bénis, mon enfant, et je remets tes crimes pour l’amour de Jésus. Tu m’as sauvée de la mort, tu m’as retirée de la fange. Que le nom du Seigneur soit glorifié… Quelle est cette femme ? ajouta-t-elle, émue de retrouver Basine près d’elle à ce moment de félicité. Si elle veut mon pardon, elle aussi l’obtiendra. Ce glorieux jour nous réunit dans une sorte de paradis, ô mes enfants…

— Ma mère, pria encore Harog, peux-tu pardonner à celui qui n’est plus ? Ragnacaire, ton ancien serviteur, que j’ai tué de ma main, cette nuit, pour ta délivrance.

— Ragnacaire, soupira l’abbesse (et brusquement bougonnante, elle ajouta :) Ragna le porcher ? Qui au lieu de garder mes porcs me les volait ? Il est mort en vilaine posture de sacrilège, ô mon fils !

— Par pitié, ma mère, absous-le puisque tu viens d’absoudre son meurtrier, gémit Harog d’une voix si hurlante de douleur que Basine, d’un geste d’enfant éperdue, se boucha les oreilles pendant que leur chienne hurlait, en écho.

— Un voleur ! Un voleur…, répétait Leubovère indignée, oubliant complètement l’assassin.

— Basine, s’exclama le pauvre Harog désespéré,