Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/46

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Et Harog siffla, modulant une plainte de rossignol amoureux.

Vers le midi de ce jour, une chaleur s’éleva de la terre, très douce, avec des odeurs de fleurs printanières, une tiède odeur de miel. Le chariot s’arrêta au milieu d’une clairière où gazouillait une source pour le repos de ceux qui le conduisaient. Rien ne bougeait plus sous le suaire, et le petit chien, au creux de la poitrine d’Harog, s’éveillait cependant, pleurant de faim. Les bœufs, déliés, allèrent chercher leur provende parmi les bonnes herbes des talus. Les hommes, ayant délacé leurs chaussures, s’assirent l’un devant l’autre, l’air embarrassés, mordant leur pain.

— Qui lui parlera ? questionna Ragnacaire.

— Nous lui mettrons la gourde pleine de lait sur la paille, répondit Harog après réflexion.

— La gourde est pleine et le petit de Mèrera va crever ? grogna le rude garçon.

— Nous ne toucherons pas à la part de la fille du chef, Ragna.

En disant cela d’un ton résolu, Harog tira brusquement le nouveau né de sa poitrine. Lui aussi aimait ses chiens et il avait déjà livré les meilleurs, sept compagnons qu’il regrettait.

— C’est une graine au vent ! fit-il en jetant la