Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/47

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boule rose dans une touffe où elle trembla comme une fleur vivante.

Alors, il y eut une apparition. Du milieu de la paille, drapée dans le suaire de lin, la fille de Chilpéric se leva. Ce fut le soleil de midi éclatant tout à coup sous les basses branches et incendiant les verdures d’un reflet d’or pur. La toison rousse roula autour d’elle en serpent léché de flammes.

— Harog, cria-t-elle avec du rire dans la gorge, donne-moi ton chien. Je le ferai boire.

Il leur sembla qu’elle était folle ou atteint du mal des filles sans retenue. Elle leur parlait d’une voix impérieuse, mais enfantine. Elle ordonnait comme une femme qui est en train de jouer. Et elle était nue sous le suaire, et elle avait les cuisses blessées par le poids des soldats de la nuit…

Ragnacaire serra les poings en ouvrant la bouche. Harog se leva, les yeux fermés.

— Tu es la fille de notre chef, dit-il gravement. Nous ne répandrons pas la nourriture qui t’est due pour un animal.

Harog, malgré sa svelte et fière taille, ses cheveux noirs bandant son front d’une dure ligne de fer, ses lèvres duvetées d’un poil de brun louveteau, son teint pâle d’une mystérieuse horreur, n’était plus le berger qui dirigeait un troupeau de mou-