Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/54

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— On ne m’offense plus, Harog. On n’offense pas les chiennes qui s’en vont mourir de mâle rage en un trou. Une chienne enragée, c’est pire qu’une louve, n’est-ce pas ?…

— Tu ne peux guère tromper ta race. Tu es une femme, Basine ! On n’est pas une chienne méchante parce qu’on a de la peine, et comment aurait-on la noirceur des louves quand on possède la blancheur des agneaux ?

— Harog, ne mens pas ! Toi, tu es le berger… meneur de louves ! Et elle éclata d’un rire strident qui fit lever des oiseaux du fond des arbres.

Cette phrase affola le jeune garçon. Elle sonnait à ses oreilles d’une étrange façon, coupante et sifflante comme une pierre de fronde.

— Moi, un meneur de louves !… Je ne sais que te dire… parce que tu me fais peur… je veillerai sur toi toute la nuit sans bouger, sans te regarder. Je n’ai pas de haine contre la fille de Chilpéric, je le jure sur mon couteau bénit.

Basine tordit ses bras au-dessus de sa tête en agitant sa chevelure qui dorait la nuit.

— Je mordrai ceux qui me baiseront et ils mourront tous de mâle rage ! cria-t-elle, la face vers le ciel, durant que ses yeux s’unissaient aux étoiles pour étinceler de feux verts.