Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/56

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— Moi, je suis reine. Ma mère, Audovère, est morte, mon frère… ils l’ont assassiné… je suis seule… et reine… j’aurai le bandeau de pourpre avec les cinq pointes. Je suis la reine de Neustrie, la fille du puissant chef et je nourris tes chiens, Harog, vilain berger de la poussière !

Elle s’étendit sur la paille, gémit doucement en prenant les intonations des petits qui se lamentent.

— Quand la lune nouvelle viendra, je saurai hurler le vrai langage des louves. Tu verras, petit berger… aiguise bien ton épieu pour ne pas me manquer.

Harog murmura, le cœur déchiré.

— Mon bras t’appartient. Dispose de moi, je n’ai jamais été l’esclave d’une femme, Basine, mais je serai fier de devenir le tien. Tu n’as plus qu’à me désigner la route.

— Nous allons à Poitiers, chez l’abbesse qui me coupera les cheveux, mes beaux cheveux couleur de miel. As-tu regardé mes cheveux, Harog ? Ils sont aussi longs que le feuillage d’un arbre.

— J’étranglerai celle qui coupera tes cheveux, Basine. Radegunde est une sainte. Elle fera le miracle de te rendre ta pureté première et ne laissera pas dépouiller la plante royale de son feuillage d’or.