Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/63

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Durant une heure, le loup resta aplati, claquant des dents, s’égueulant de colère, n’osant ni ramper ni bondir. Probablement quelque chasseur se tenait aux remparts avec une fronde ou des flèches empoisonnées.

Des trompettes répondirent à la voix grave de la trompe par une envolée de chansons aiguës, voix de petites filles lâchées dans un préau, puis ce fut les répons, l’antienne, les psaumes, toute une musique aigre secouant ses grelots sur la tête du loup affamé qui, n’y tenant plus, se mit à hurler férocement.

Non, la place n’était pas bonne pour tenter l’assaut.

Le loup se laissa glisser le long des pentes du ravin. Il tomba dans un marais couvert d’épines, rebondit de la glace aux bords festonnés de neige et grimpa de l’autre côté. N’importe quel danger plutôt que ce bruit de fête qui lui crevait à la fois le tympan et le ventre. Il fallait y aller ou mourir. Sus ! On irait !

Il tourna deux fois autour de la ville. Aucune porte ne s’ouvrait. On ne voyait, du reste, attendant l’ouverture, ni chevaux ni piétons, et le froid tenait les veilleurs enfermés dans les logettes des contreforts.