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Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/202

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menue feuille qui se tendra comme une petite main ? Eh bien, c’est la dernière branche du centenaire, il revit. Sa race renaît !

À gauche du chevalet, du tronc luisant de l’arbre mort, a jailli une minuscule pousse écartant péniblement l’écorce, puis, plus solide et aussi parce qu’en face d’elle j’ai laisse pénétrer le soleil, la branchette s’est dressée peu à peu, du vert tendre passant au vert foncé, du jade allant à la translucide émeraude, écartant, comme des doigts, une feuille de platane, parfaitement conformée.

— Voilà, Francine. C’est un miracle. Un arbre desséché depuis que nous sommes ici, c’est-à-dire depuis plus de seize ans, nous apprend que certaines puissances sont éternelles.

D’un air incrédule, Francine secoue la tête :

— Je dois dire à Monsieur que ça lui est arrivé plusieurs fois, à cet arbre-là, depuis que je le connais, seulement c’est la première qu’on ne me le laisse pas frotter. Quand je faisais le ménage ici, les autres printemps, je lui donnais quelques bons coups de plumeau et je le passais à l’encaustique pour le débarrasser de tous ces vilains petits champignons qui pourrissaient. Si j’avais su que ça plaise à Monsieur, ce genre de bourgeon-là…