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Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/32

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Votre bouche est tellement bien faite pour goûter à tout ! Êtes-vous gourmande ?

Elle rougit, se laisse envelopper le bras. Cependant son inquiétude n’est pas feinte, car, dans cette rue sombre, elle est soudainement fardée de ce reflet framboise des nuées de là-haut.

— Comment avez-vous deviné ça ? Seulement, si je vais avec vous, je veux que vous disiez tout de suite où vous voulez me conduire. Là-bas, c’est un hôtel. Est-ce qu’on y prend le thé devant tout le monde ?

— Vous avez peur d’y rencontrer quelqu’un ? On prend toujours le thé devant tout le monde. En voilà une question, petite madame ingénue ! Nous causerons comme de vieux amis, ensuite nous nous en irons, chacun de notre côté. Je ne vous demanderai pas votre adresse et je vous donnerai la mienne, ce qui vous laissera la liberté de ne jamais revenir ou de nous revoir. Là, êtes-vous tranquille ?

J’emploie le suprême argument pour corriger l’insolence de l’ironie :

— Dans cette aventure, que je veux charmante, une minute toute rose comme vos lèvres, j’offrirai tout et ne demanderai rien. Est-ce que votre mari vous attend à cinq heures du soir ?