Page:Radcliffe - L’Italien (trad. Fournier), 1864.djvu/83

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de me transmettre. Jamais je ne me condamnerai volontairement à demeurer enfermée dans un cloître, ni à subir la dégradation dont vous me menacez. Prête à supporter tous les mauvais traitements qu’il vous plaira de m’infliger, ce n’est pas du moins de mon propre consentement que je serai malheureuse et opprimée. La conscience de mes droits et le sentiment de la justice soutiendront mon courage jusqu’au bout ; et je ne manquerai pas, soyez-en sûre, à ce que je me dois à moi-même. Vous connaissez mes résolutions, madame ; et, comme elles ne changeront pas, je ne vous en parlerai plus.

La surprise avait empêché l’abbesse d’interrompre ces paroles si hardies. Jamais on ne lui avait tenu tête avec cette fermeté.

— Sortez ! fut le seul mot qu’elle put dire en se levant avec impatience de son fauteuil.

Elena, reconduite à sa cellule, se mit à repasser en esprit sa conduite avec l’abbesse et ne put se repentir de la franchise avec laquelle elle avait défendu ses droits. Elle s’applaudit de ne pas s’être oubliée un instant, soit en se laissant emporter par son indignation, soit en se laissant abattre par la crainte. Elle résolut d’éviter désormais toutes les scènes du même genre et de repousser par le silence les injures auxquelles elle pourrait être exposée. Des trois maux entre lesquels elle avait à choisir, sa captivité, quelque douloureuse qu’elle fût, lui semblait de beaucoup préférable au mariage dont on la menaçait ou aux vœux perpétuels qu’on voulait lui arracher. Ce fut donc à la résignation qu’elle essaya d’habituer son âme. Depuis son entrevue avec l’abbesse,