Page:Radiguet - Souvenirs, promenades et rêveries, 1856.djvu/31

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jambes grêles, dont la partie inférieure, serrée par une guêtre, venait aboutir à d’énormes sabots taillés en boule. Leurs voisins de Carhaix, enjoués, communicatifs, pétulants, avaient une mise conforme à leur caractère : c’était un habit galonné de bleu, et un pantalon collant fermé par une garniture de boutons argentés montant au-dessus du genou. On remarquait aussi les beaux de Pont-l’Abbé, aux vestes courtes, frangées de laines de couleur, aux gilets bordés aux cols de nombreux passements, aux pantalons formés de tuyaux d’étoffe, assez larges pour cacher le pied et pour loger des jambes d’éléphant ; puis c’étaient encore les chapeaux ornés d’un triple tour de chenille bigarrée, de torsades de cannetille et de plumes de paon des gens du Faou et de ses environs, et les bonnets bruns de ceux de Plouneventer, et les bonnets phrygiens couleur de pourpre de ceux de Plougastel. À toutes les bouches se montrait une pipe assez courte et assez épaisse pour défier les chocs ; à tous les poignets se balançait, suspendu par une lanière de cuir, le pen-bas, inséparable compagnon des paysans du Finistère. — Nous ne disons rien des femmes ; elles y étaient en petit nombre, et leur costume n’avait aucun caractère : mais pour compléter ce dénombrement de l’assemblée, il nous faut parler de l’inévitable accessoire de toutes les fêtes et de tous les pardons de la basse Bretagne, de ces groupes de mendiants étalant au bord des chemins leurs hideuses guenilles et leurs infirmités repoussantes. — Nous avons vu dans bien des pays des gueux cruellement maléficiés, des nègres lépreux aux Antilles, des victimes du pian au Brésil et de l’éléphantiasis à Taïti, sans que le douloureux spectacle de ces misères