Page:Radiguet - Souvenirs, promenades et rêveries, 1856.djvu/61

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averse tigrant autour de moi le sol, m’ont forcé de chercher un abri que j’ai trouvé… une heure après avoir reçu une douche complète. Ma disposition d’esprit n’y a gagné, je le crains, qu’une pointe d’humeur particulièrement préjudiciable à mes idées antérieures sur le printemps, et je reconnais, à mes doutes actuels, combien il était juste qu’on m’escamotât le dénouement de mon rêve. Mais des doutes infiniment plus sérieux m’alarment. Au moment où j’achève de rassembler ces feuilles éparses, je me demande si elles atteindront le but que je me suis proposé en te les écrivant. Le cœur, je le sais trop, hélas ! a ses caprices, et il s’avise parfois de faire pousser en regrets les souvenirs que l’on y sème à certaines heures : aussi ai-je voulu, dès mes premières lignes, te prémunir contre une surprise de ce genre. Ce n’est point assez : je veux encore placer au front de ces pages un titre, qui, semblable à une vigie signalant un danger, pourra peut-être éveiller tes défiances et te préparer à d’autres mécomptes ; si tu n’as pas oublié ce dicton du pays : « Traître comme un jour de printemps ! »


(Illustration, — 12 mai 1855.)