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HISTOIRE DU SOLDAT


et avec cet argent tout ce qu’il voulait ;
marchand d’abord, marchand d’objets,
marchand de toute espèce d’objets d’abord, et puis

il n’y eut même plus besoin d’objets, parce qu’on entre dans l’esprit,

et j’use des autres comme j’entends,
parce que je sais, moi, là où les autres croient seulement.

C’est un livre… un coffre-fort !
On n’a qu’à l’ouvrir, on tire dehors…
Des titres.
Des billets.
De l’OR.

Et les grandes richesses, alors,
et tout ce que les grandes richesses sont dans la vie,
femmes, tableaux, chevaux, châteaux, tables servies ;
tout, j’ai tout, tout ce que je veux ;

tout ce qu’ont les autres, et je le leur prends, et, ce que j’ai, ils ne peuvent pas, eux !


Alors il sort, parfois, le soir, se promener.

Ainsi, ce soir ; c’est un beau soir de mai.

Un beau soir de mai, il fait bon ;
il ne fait pas trop chaud comme plus tard dans la saison.

On voit le merle faire pencher la branche, puis, la quittant,
la branche reprend sa place d’avant.

J’ai tout, les gens arrosent les jardins, « combien d’arrosoirs ? »

fins de semaine, samedis soir,
il se sent un peu fatigué,