Page:Ramuz - Joie dans le ciel.djvu/28

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le sien, et lui, qui était innocent, allait être puni à cause de moi. J’ai vu qu’il allait y avoir, pour lui aussi, les hommes, et ils seraient ses ennemis, alors que, moi, je ne serais plus là. Et j’ai cru que c’était mon amour qui parlait, parce que je ne savais pas bien ce que c’est, et personne ne le savait, en ce temps-là, sur la terre. Je me suis dit : « Voilà qu’il dort, il ne se doutera de rien ; il passera seulement de son rêve à un plus grand rêve. » Je l’ai bien embrassé et réembrassé, bien serré encore une fois. Je lui ai chanté sa chanson encore une fois. Je lui ai chanté la chanson qu’il aimait ; je me suis levée. Je lui ai dit adieu ; j’ai détourné la tête. J’ai fait un grand mouvement de côté avec les bras. J’ai entendu le bruit… Et puis il n’y a plus rien eu ; sauf qu’à la place où je l’avais tenu, j’ai senti venir un grand froid, comme si tout l’air de la