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DANS LA MONTAGNE

soirs, sans un mot, — le neveu se serrant contre son oncle qui de temps en temps se passait la main sur le front, puis se laissait de nouveau aller tout entier en avant ; Barthélemy faisant toujours bouger sa barbe ; Joseph qui était là aussi, ou du moins semblait être là, mais est-ce qu’il y était ? ensemble et pas ensemble, ayant allumé un grand feu, se serrant les uns contre les autres autour du feu, attendant on ne savait quoi, obligés pourtant d’être là, — et séparés des autres hommes, mais en même temps séparés entre eux : le maître, son neveu, Barthélemy, Joseph, puis il avait encore Clou, mais lui se tenait à l’écart.

Ils commençaient une nouvelle nuit, et le pire moment de la journée était toujours pour eux ces commencements de la nuit. Ils ont entendu meugler les bêtes dont il y avait de nouveau plusieurs qui venaient d’être atteintes par la maladie, le troupeau ayant été poussé par eux pour la nuit sous la roche, et là meuglaient les bêtes malades qu’ils ne prenaient plus la peine d’isoler, ayant vu que la précaution ne servait à rien. Mais c’est que rien ne va plus servir à rien, comme ils avaient fini par voir aussi ; alors encore une fois la nuit venait, tandis qu’ils