Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/287

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pour terminer, lâcha une canonnade retentissante qui fit miauler les chats à la ronde. Ayant fini ses jeux, le frère se leva, avec un sérieux imperturbable, au milieu des rires et des applaudissements de tout son auditoire ; sans attendre qu’on lui décernât la récompense promise, il saisit le gâteau d’amandes, le serra contre son sein et, d’un coup de poing en pleine poitrine, renversa sur son banc le Beccafico qui lui contestait d’avoir gagné son pari.

— Il est à moi, ce gâteau, cria-t-il, et je le garderai, et je le mangerai tout seul… à moins, ajouta-t-il avec le plus galant sourire, à moins qu’une jeune beauté, séduite par mon talent, ne veuille bien venir à côté de moi en prendre une part.

Il parlait encore lorsque Michele des Étoiles s’approcha, et lui frappa l’épaule :

— Rustre ! fit-il, quel sale plaisir prends-tu à parodier la voix que Dieu a donnée aux hommes ?

— Mais, seigneur, dit Arrivabene, je ne parodie rien. C’est vous qui choisissez entre les cadeaux du bon Dieu, exaltant les uns et crachant sur les autres. Moi, je l’honore dans tous ses dons, grands et petits. Il n’est point de jour, par exemple, où je ne remercie son infinie bonté de l’excellent estomac et du docile derrière dont elle m’a gratifié. Vous auriez peut-être voulu m’entendre réciter vos sonnets, mais je me place à la portée de ces braves gens ; ils sentent ma musique, tandis qu’ils n’auraient sans doute pas compris vos vers, qui manquent de clarté.

Cependant, après avoir bu un vieux vin de Sicile qui sortait des caves du château, les convives se levaient aux sons des flûtes et des violons, et aussitôt les danses commencèrent, ardentes, ivres, emportées. Le jeune Beccafico me serrait contre lui, les bras autour de ma taille, les jambes dans les miennes. Il ex-