Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/288

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citait de telle sorte ma honte et mon désir que je le mordis au visage. Il me répondit, avec la colère d’un homme en rut, en m’écrasant la joue sous un rude soufflet de campagnard. Cette violence, loin de m’irriter, me fut délicieuse. Tandis qu’il goûtait en moi la séduction de toutes les luxures inconnues, de toutes les grâces étrangères à sa rude sensualité, moi je subissais avec lui le charme des simples instincts, des libres amours, de la Terre ! Oh ! que j’eusse voulu me rouler sous son corps dans la boue chaude des fossés ! J’étais comme une bête en folie, ne conservant de la femme qu’une aptitude merveilleuse à jouir et à tirer de fines émotions des plus brutales étreintes. À présent, j’entraînais mon cavalier plus qu’il ne me conduisait. Il avait peur de mes yeux enflammés de plaisir, et des caresses de ma langue, et de ces jeux que l’on ne sait point au village. Il hésitait à me prendre.

— Voyons ! disais-je, mettons-nous là ! là !

Mais où trouver un abri ? Dans les champs voisins, tournés ou accroupis contre les haies, hommes et femmes se soulageaient librement ; et moi, sans plus me soucier de ces misères de nature que des regards curieux qui ne me quittaient pas, je ne songeais qu’à m’étendre n’importe où, aux yeux de n’importe qui, pour que ce paysan me possédât.

Tout à coup au détour d’un chemin, Fasol apparut, rouge de colère.

— Qu’est-ce que cela signifie ? demanda-t-il, où vas-tu ?

À la vue de mon ami, le Beccafico, pris de frayeur m’avait abandonnée. Comme je détournais la tête, je l’aperçus, à travers champs, qui détalait à toutes jambes.

— Je suis folle ! m’écriai-je et je me mis à pleurer. Je pleurais sur mon corps avide d’amour et qui devait s’offrir ainsi, en des moments d’ivresse, à des êtres