Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/94

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bien et vous donne l’air d’être frères. Il n’y a qu’une sorte de gens à qui la religion de ce dieu peut sembler agréable, c’est à ceux qui s’en vont dans les cimetières respirer la pourriture des tombeaux, aux disciples du frère Gennaro, du frère Hiver, du frère La Mort !

Ces paroles, qui naguère m’avaient effrayé comme d’horribles blasphèmes, je les répétais à présent du fond de l’âme. Elles me semblaient avoir l’accent même de la vérité. C’était sûrement ce méchant Dieu qui me volait Guido.

Et Guido aussi me haïssait. Je n’eus plus à en douter, lorsque après cette malheureuse nuit il s’approcha de moi et me dit sur un ton de colère :

— Tu t’en iras aujourd’hui, infection ! Tu t’en iras aujourd’hui ou je te dénonce.

— Guido, m’écriai-je, oubliant mon ressentiment et près de fondre en larmes, que t’ai-je fait de si odieux pour que tu me parles de la sorte ?

Mais il me tourna le dos et s’éloigna en répétant ses menaces. Alors, retrouvant ma fureur, je ne souhaitai plus que de me venger. Quoi ! me dis-je, il s’est ainsi joué de moi, il m’a attirée dans ce palais pour me montrer qu’il ne m’aimait plus, et, parce que je murmure aujourd’hui contre ce subit dédain, il veut me chasser ! Ah ! il saura ce dont je suis capable !

Après le service commun qui nous était imposé, et que nous achevâmes sans prononcer un mot, sans échanger un coup d’œil, des tâches diverses allaient nous séparer, quand le frère vint prendre Guido, comme il le faisait de temps à autre, pour lui parler de Dieu. Je vis Guido monter à la chambrette du frère et s’y enfermer avec lui. Les suivant, je me couche à plat ventre, mets l’oreille contre le jour de la porte et j’essaie de saisir quelques-unes de leurs paroles. J’étais