Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/65

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fortifiant et léger ; on plane de haut dans l’espace, et quand on voit au loin l’aigle porté sur ses fortes ailes, on se demande presque si l’on ne pourrait comme lui voler au-dessus des campagnes et des collines, en laissant tomber de haut sa vue sur les petites œuvres des hommes. Que de fois, bien plus encore pour la volupté de voir que pour la douceur du repos, je me suis accoudé près de la source de la montagne, en reportant mes regards de la discrète fontaine à ce grand monde inférieur qui se perdait au loin dans le cercle infini de l’horizon !

De la vasque de la source s’épanche un petit filet d’eau qui çà et là disparaît dans une rainure du sol entre les touffes de gazon ; il se montre et se cache tour à tour : on dirait une série de fontaines superposées. À chaque nouvel élan, le ruisselet prend une autre physionomie ; il se heurte sur une saillie de rocher et rebondit en paraboles de perles ; il s’égare entre les pierres, puis s’étale dans un petit bassin sablonneux ; ensuite,