Aller au contenu

Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ne cesse de se reformer d’année en année. Il serait donc facile de remonter le ravin dans toute sa longueur sans avoir à se servir de ses mains pour une seule escalade ; toutefois, celui qui aime la nature de près méprise le sentier battu et se glisse avec joie dans l’étroit espace ouvert entre les berges. Dès les premiers pas, il se trouve comme séparé du monde. En arrière, un détour de la gorge lui cache le ruisseau et les prairies qu’il arrose ; en avant, l’horizon est brusquement limité par une série de gradins d’où l’eau, quand il en coule, descend en cascatelles ; au-dessus, les branches des arbres qui bordent le défilé se recourbent et s’entrecroisent en voûte ; les bruits du dehors ne pénètrent pas dans cette sauvage vallée presque souterraine.

C’est une grande joie de se retrouver ainsi dans la nature inviolée à quelques pas des champs labourés en sillons parallèles et d’être obligé de se frayer un chemin à travers rochers et broussailles, non loin de