Page:Reclus - John Brown, 1867.djvu/4

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de la Cour suprême des États-Unis, le nègre n'a aucun droit que le blanc soit tenu de respecter. »

Ce sont là les abominations qui navraient John Brown.

Dès l'âge de douze ans, lors d'un voyage qu'il fit en Virginie, il s'était juré, en voyant battre un petit nègre à coups de fouet, que, pendant toute sa vie, il serait du parti des faibles contre les forts. Sa ferme de North-Elba était devenue une des stations les plus importantes de ce « chemin de fer souterrain » par lequel les esclaves fugitifs des États du Sud s'échappaient vers le Canada. John Brown les accueillait en frères, leur donnait des vivres pour la route, leur marquait les étapes, et, s'armant de sa carabine, les accompagnait la nuit par les sentiers des bois jusqu'à la demeure de l'affilié le plus voisin. Et, cependant, Brown se reprochait de ne pas faire davantage pour l'œuvre de la liberté.

Après avoir tenu un conseil de famille, vers la fin de l'année 1854, John Brown et ses fils décident qu'ils abandonnent la terre libre et pacifique des États du Nord pour aller s'établir au Kansas, sur la frontière même du pays d'esclavage. C'est à la fois par la charrue et par le fusil qu'ils veulent travailler à la conquête de ce nouveau territoire : en cultivant eux-mêmes le sol, ils opposeront une barrière aux envahissements des planteurs et maintiendront la dignité du travail manuel ; en défendant leurs champs par les armes, ils permettront à des colons pacifiques de s'établir